Certes, Baden Powell a fait une partie de sa carrière en France. Certes, Naná Vasconcelos a sorti ses deux premiers albums sur le même label que Baden, Saravah. Mais pour deux grands maîtres, combien de fumisteries ? Il s'agit d'une vieille manie nationale, une forme d'ingérence qui ne dit pas son nom. En France, on a une fâcheuse prétention à avoir notre propre vision de la musique des autres. En matière de musique brésilienne, la dernière venue s'appelle Flavia Coelho. Et c'est elle qui est mise en avant par la grande chaîne de supermarchés culturels qui avait jadis vocation à être "agitateur culturel" ! Alors qu'au Brésil l'année a été particulièrement riche en albums sublimes, en France on préfère la Bossa Muffin, sic !
Parce qu'en France, on ne se contente pas de faire découvrir de nouveaux artistes brésiliens, non, on préfère carrément inventer un nouveau style musical, ici la bossa muffin ! Il s'agit du titre de l'album de cette charmante jeune femme qui a tapé dans l'œil d'un professionnel de la profession qui a pignon sur rue et possède deux studios d'enregistrement...
Les musiciens brésiliens à avoir fait carrière en France sont nombreux, y compris ceux qui sont restés inconnus dans leur pays d'origine, ce qui est souvent un mauvais présage. De cette longue histoire se détachent bien quelques figures de génie, Baden Powell ou Naná Vasconcelos donc. Quelques divisions en dessous, il y eut également Nazaré Pereira, Mônica Passos ou Les Etoiles. Ou plus récemment Bïa ou Márcio Faraco. Tous ayant en commun d'avoir à un moment de leur carrière vécu en France et d'y avoir été signés sur un label national. Nous eûmes aussi droit à des styles dénaturés et présentés dans une version racoleuse, Kaoma pour la lambada ou Carrapicho pour le bumba meu boi. Mais reconnaissons également que c'est sur un label français, Delabel, que Carlinhos Brown a sorti Alfagamabetizado, son premier album.
Si le monde de la musique au Brésil est un univers hyper-concurrentiel débordant de talents où il est difficile de faire son trou, le choix de la France n'a rien d'un Eldorado. Outre que l'exil est le meilleur combustible de la saudade, on peut souhaiter à Flavia Coelho d'enchaîner les dates et avoir suffisamment de cachets pour obtenir le statut d'intermittente du spectacle.
Franchement, je n'ai rien contre Flavia Coelho et sa musique. Mais c'est quoi cette bossa muffin, à part une tentative éhontée de faire du racolage musical ? C'est une musique plutôt bien troussée, souvent acoustique, et qui balance plutôt reggae. Les paroles sont le plus souvent en portugais... La musique de Flavia Coelho est légère, enlevée... Ensoleillée est le qualificatif qui reviendra le plus souvent pour la décrire parce qu'on n'a pas grand-chose d'autre à en dire. Ses chansons sont peut-être très personnelles mais... insipides, sans aucun caractère. Et la prose que nous sert son Blue Line Productions, son label, en guise de biographie sent carrément l'arnaque à plein nez. "Son titre, Bossa Muffin (...) claque comme une déclaration d’indépendance, ou un manifeste. Mais un manifeste sans dogmes ni mots d’ordre, qui dans la spontanéité du geste musical chanterait avant tout les vertus du métissage, de la mondialisation sous son visage le plus humain". Du vent, le genre de phrases creuses que nous balancent les labels pour faire mousser des artistes trop plats.
Dans le rap, la street credibility est parfois un critère d'exclusion alors que l'on sait pourtant que tous les rappeurs ne viennent pas du ghetto et que c'est notamment le cas de quelques uns parmi les plus intéressants d'entre eux. Mais la street cred', ça sert à repérer les intrus, les "faux", les avatars inventés par les maisons de disque parce qu'ils sont moins gênants... Appliquée à d'autres genres musicaux, il serait parfois bon d'interroger la crédibilité de certains artistes ? D'où vient Flavia Coelho ? A quelle scène brésilienne est-elle rattachée ? Par quels pairs est-elle reconnue ? Cela nous fera gagner du temps.
On sait le peu de place accordée en France aux musiques brésiliennes. Actuellement, s'ouvre pour la musique brésilienne une période exceptionnelle de créativité où de nouveaux artistes très nombreux re-visitent leurs racines pour mieux être ouvert à leur temps. A l'humble échelle de ce blog et rien que cette année, nous avons présenté de nombreux albums et artistes passionnants. Au lieu de ça, à l'heure des cadeaux de Noël, que voit-on en tête de gondole ? Navrant...
Les musiciens brésiliens à avoir fait carrière en France sont nombreux, y compris ceux qui sont restés inconnus dans leur pays d'origine, ce qui est souvent un mauvais présage. De cette longue histoire se détachent bien quelques figures de génie, Baden Powell ou Naná Vasconcelos donc. Quelques divisions en dessous, il y eut également Nazaré Pereira, Mônica Passos ou Les Etoiles. Ou plus récemment Bïa ou Márcio Faraco. Tous ayant en commun d'avoir à un moment de leur carrière vécu en France et d'y avoir été signés sur un label national. Nous eûmes aussi droit à des styles dénaturés et présentés dans une version racoleuse, Kaoma pour la lambada ou Carrapicho pour le bumba meu boi. Mais reconnaissons également que c'est sur un label français, Delabel, que Carlinhos Brown a sorti Alfagamabetizado, son premier album.
Si le monde de la musique au Brésil est un univers hyper-concurrentiel débordant de talents où il est difficile de faire son trou, le choix de la France n'a rien d'un Eldorado. Outre que l'exil est le meilleur combustible de la saudade, on peut souhaiter à Flavia Coelho d'enchaîner les dates et avoir suffisamment de cachets pour obtenir le statut d'intermittente du spectacle.
Franchement, je n'ai rien contre Flavia Coelho et sa musique. Mais c'est quoi cette bossa muffin, à part une tentative éhontée de faire du racolage musical ? C'est une musique plutôt bien troussée, souvent acoustique, et qui balance plutôt reggae. Les paroles sont le plus souvent en portugais... La musique de Flavia Coelho est légère, enlevée... Ensoleillée est le qualificatif qui reviendra le plus souvent pour la décrire parce qu'on n'a pas grand-chose d'autre à en dire. Ses chansons sont peut-être très personnelles mais... insipides, sans aucun caractère. Et la prose que nous sert son Blue Line Productions, son label, en guise de biographie sent carrément l'arnaque à plein nez. "Son titre, Bossa Muffin (...) claque comme une déclaration d’indépendance, ou un manifeste. Mais un manifeste sans dogmes ni mots d’ordre, qui dans la spontanéité du geste musical chanterait avant tout les vertus du métissage, de la mondialisation sous son visage le plus humain". Du vent, le genre de phrases creuses que nous balancent les labels pour faire mousser des artistes trop plats.
Dans le rap, la street credibility est parfois un critère d'exclusion alors que l'on sait pourtant que tous les rappeurs ne viennent pas du ghetto et que c'est notamment le cas de quelques uns parmi les plus intéressants d'entre eux. Mais la street cred', ça sert à repérer les intrus, les "faux", les avatars inventés par les maisons de disque parce qu'ils sont moins gênants... Appliquée à d'autres genres musicaux, il serait parfois bon d'interroger la crédibilité de certains artistes ? D'où vient Flavia Coelho ? A quelle scène brésilienne est-elle rattachée ? Par quels pairs est-elle reconnue ? Cela nous fera gagner du temps.
On sait le peu de place accordée en France aux musiques brésiliennes. Actuellement, s'ouvre pour la musique brésilienne une période exceptionnelle de créativité où de nouveaux artistes très nombreux re-visitent leurs racines pour mieux être ouvert à leur temps. A l'humble échelle de ce blog et rien que cette année, nous avons présenté de nombreux albums et artistes passionnants. Au lieu de ça, à l'heure des cadeaux de Noël, que voit-on en tête de gondole ? Navrant...
Un coup de gueule qui fait du bien. Car en effet ça n'est pas épais. Le genre de single qui ne sert à rien. Mais courage, un autre monde - au moins musical - est possible :-)
RépondreSupprimeroui les arnaques pullulent, et le mainstream en "musiques du monde" est aussi mauvais que dans les autres rayons des disquaires. Mais pourquoi ça serait différent d'ailleurs?
RépondreSupprimerJe me suis souvent demandé pourquoi les producteurs de musique du monde préféraient produire leurs artistes plutôt que de distribuer et promouvoir les grands artistes qui ont déjà sortis des chefs d'oeuvre. C'est sans doute pour avoir un produit formaté (genre la lambada), mais aussi peut être simplement car il y a plus d'argent à se faire à être titulaire des droits et que ça coute très cher de racheter des droits de chansons déjà enregistrées. Qu'on pense à Orchestra Baobab ou le Poly Rhytmo où ils ont refait des albums très moyens alors que plein de classiques de leur grande époque sont toujours introuvables! Ou même l'invention du Buena vista social club ! Sans parler des rencontres exotiques organisées par des producteurs entre des musiciens de régions différentes qui donne des résultats souvent complétement artificiels et superficiels.
Et pour saluer les producteurs français quand ils ont le nez fin, le premier album de l'immense Violetta Parra a été produit en France sur le label Chant du monde dans les années 50. La classe quand même.
Bonsoir docteur,
RépondreSupprimerJe suis « LE » producteur qui a sortit « sa » chanteuse brésilienne…
Tout d’abord, merci beaucoup pour l’intérêt que vous portez à notre musique, j’en suis très touché.
Cela dit, si vous le permettez, j’aimerais apporter quelques précisions à vos allégations.
Tout d’abord, il ne s’agit en aucun cas d’une histoire de producteur à la recherche de LA chanteuse brésilienne qui cherche à faire LE hit… c’est un peu facile et bien trop cliché je trouve !
Flavia et moi nous sommes rencontrés dans un cabaret à Paris, dans lequel elle chantait six soirs par semaine, toute la nuit, depuis 4 ans, car flavia est une vraie bosseuse (Pour votre gouverne, ca fait maintes années qu’elle a suffisamment de cachets pour être intermittente du spectacle…)
Elle avait déjà entamé, avec son ami musicien camerounais Bika Bika Pierre (compositeur de 60% des titres de l’album « Bossa Muffin ») l’enregistrement de quelques titres dans un autre studio, mais elle cherchait une autre direction, un autre son et une autre manière de travailler.
En ce qui me concerne, je suis effectivement comme vous l’avez souligné dans votre article, propriétaire d’un studio d’enregistrement à Paris, et j’ai donc proposé à Flavia d’essayer un titre pour voir si nos univers et nos idées étaient compatibles car je suis avant tout musicien...ce qui s’est avéré être le cas !
Voilà un peu plus de deux ans que nous avons commencé la réalisation de l’album « Bossa Muffin », il est question ici d’une réelle « auto-production », c'est-à-dire que Flavia a produit son album, en s’épaulant sur ma structure, et cet album est ma première réelle production, donc bien loin de toute stratégie préméditée de maison de disque ou de producteur blasé et expérimenté, calculant son coup pour sortir l’album d’une jolie chanteuse exotique qui lui aurait « tapé dans l’œil », juste au moment des fêtes de Noel…
Concernant le contenu de l’album, votre point de vue a le mérite d’être le vôtre (même si je le trouve un peu sévère : « insipides, sans aucun caractère ») et sur ce point je n’ai rien à ajouter.
Mais c’est votre démarche que je trouve déplacée.
C’est bien beau et si accessible de faire référence à des artistes sublimes et intouchables (à qui Flavia rend d’ailleurs hommage très souvent, par exemple ici : http://www.rfi.fr/emission/20111219-2-flavia-coelho), mais permettez-moi de vous rappeler que dans quelques jours, nous serons en 2012. Les musiques changent, les gens voyages, les enfants grandissent, les idées se croisent, les sons évoluent, et malheureusement pour vous, certaines personnes vieillissent sans prendre le train en marche ! Votre analyse est celle d’un traditionnaliste aigu !
Au lieu d’encourager la démarche d’une jeune artiste brésilienne amoureuse de la France et du métissage, vous préférez imaginer des scénarios de mise en scène de producteur et de « racolage musical », ou bien encore de rechercher « de quels pairs est-elle reconnue » ! Je me demande qui cela intéresse ?!
Pardonnez-moi de dire ça, mais je trouve ça terriblement dommage, d’avoir un esprit si rétrograde de nos jours.
Bref, je ne cherche nullement à négocier avec vous : Vous n’aimez pas, vous n’aimez pas !
Mais j’espère au moins que vous comprendrez (et que vos rares lecteurs aussi), dans quel décor a été fait cet album, car une grande partie de ce que vous affirmez à ce sujet sans vraiment le savoir est faux, et injustement diffamateur.
Merci
Victor
Merci pour ce commentaire qui amène des précisions nécessaires sur le parcours de Flavia Coelho. A vrai dire, j'étais persuadé en publiant ce texte d'avoir une réaction de votre part. Justement parce que j'avais bien compris, contrairement à ce que vous laissez entendre, que cet album est un projet auto-produit porté par de vraies personnes !
RépondreSupprimerJe n'ai pas non plus mis en doute l'investissement personnel de Flavia mais vous ne m'ôterez pas de l'idée que choisir un titre comme Bossa Muffin est assez racoleur car la bossa dans le morceau titre, je la cherche encore. Bien sûr, pour un artiste, chercher à attirer l'attention est bien légitime.
C'est pourquoi la lecture de ce texte aurait dû vous faire comprendre que mes reproches ne sont pas tant adressés au disque de Flavia ni à votre travail de producteur mais sont plutôt tournés vers cette inculture française à l'égard des musiques brésiliennes. Vous avez réussi votre coup en plaçant l'album de Flavia Coelho en tête de gondole à la FNAC au moment de Noël, tant mieux pour vous, hélas pour la musique brésilienne que nous défendons ici.
Quant à votre laïus sur "la musique change (...) certaines personnes vieillissent sans prendre le train en marche", je vous inviterai, si vous le voulez bien, à prendre quelques instants pour parcourir nos pages, vous constaterez que je ne suis peut-être pas rétrograde et justement très attentif à la nouvelle génération d'artistes brésiliens indépendants, brillants eux, et inventifs ! Mais si ce train en marche est celui de votre soi-disant "bossa muffin", excusez-moi mais je préfère rester à quai !
Je suis ravi de cet échange et vous souhaite très sincèrement bien du succès.
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