Après être déjà passé par ici en 2008, Radio Nova repose sa caravane au Zénith de Montpellier et propose une affiche alléchante : Baloji, Féloche, Detroit Grand Pubahs et le Scratch Bandits Crew. Ceci dit, je vous avouerai que c'est surtout Baloji qu'il me tenait à cœur de découvrir sur scène.
Après le rap rumba de Baloji et son Orchestre de la Katuba, le chanson sauce gumbo de Féloche, l'obsession du booty des Pubahs allait-il mettre le feu au dancefloor ?
Le Zénith est encore presque vide à vingt heures pétantes, juste avant l'entrée en scène de Baloji à qui revient la lourde responsabilité de chauffer la salle. On se dit alors que sa position sera très ingrate, vu le peu de monde encore dans les travées et la fosse. Mais instantanément, dès qu'il entame son set, tout le monde rapplique. Et le public est vite mis dans sa poche.
Petit regret qui était prévisible : la Fanfare de la Confiance et la Chorale de la Grâce ne sont pas sur scène avec Baloji tant il existe des réalités économiques complètement sourdes à la dimension artistique. Après, l'Orchestre de la Katuba se suffit à lui-même. Quand vous avez "Papa Dizzy" Mandjeku à la guitare et Didier Likeng à la basse, avec vous sur scène, vous êtes parés. Le premier est un guitariste de légende, fondateur des Grands Maquisards, le second bassiste et camerounais. Après tout, si en Afrique la guitare est congolaise, ne dit-on pas que le Cameroun est le pays des bassistes : "la basse est au Cameroun ce que les batucadas sont un Brésil : l'emblème fort de son identité musicale"(Frédéric Lejeal in Jeune Afrique)...
Avec cette formation concentrée sur l'essentiel, Baloji peut mener le show. Bonne présence, bonne énergie. Pour se mettre le public dans la poche, il lui donne du "Montpellier" en toute occasion : "comment ça va Montpellier ?", "faut bouger Montpellier", vous voyez le genre. Non seulement il "mouille le maillot" mais, en plus, à force de s'agenouiller, j'ai même eu l'impression qu'il commençait à déchirer son pantalon au genou. Vu qu'il était en costume, c'est embêtant, il sera désormais obligé de porter la veste avec un jean.
Papa Dizzy, s'il n'a pas eu droit à son sébène, peut quand même nous faire son morceau de bravoure, quand il se leva de son siège (le monsieur est volumineux), c'est pour jouer la guitare derrière les épaules. Wouaahhh ! Ca fait toujours son petit effet. Quant à Mr. Bass Likeng, laissez-lui un brin d'espace et ça slappe, et ça groove en glissando sur le manche en même temps que ça chante. Là aussi, ça fait toujours son petit effet, surtout devant un public pas spécialement composé de vrais aficionados...
Sans "les trombones fendus par le soleil" de la Fanfare de la Confiance, comme il le disait à Mondomix, le son est plus lisse, plus clair, ce qui n'empêche pas Baloji d'être très communicatif, d'incarner sa musique et ses textes. Son rap à la moamba est du goût du public. A l'aise, il plante une ambiance comme il faut, car malgré la gravité parfois du propos, un concert est fait pour s'amuser. Examen réussi, haut la main...
Pause. Propos bêtifiants d'animateurs débiles, je ne savais pas que les "voix" de Nova étaient tombées si bas. Une bière au bar.
Un deuxième round s'annonce avec Féloche. Avec sa mandoline en bandoulière, Féloche a imposé une formule originale avec sa chanson d'inspiration cajun. Bon, sa vision d'une Louisiane mythique tient plus des "musiques des préfectures autonomes" que jouait L'Attirail, il y a une bonne dizaine d'années que d'une approche fidèle à l'original. N'est-ce pas là l'intérêt ? La création, l'inspiration.
Bon, cette photo n'est pas de moi. Ah ? Vous aviez deviné. J'avoue pire : elle n'a même pas été prise pour l'occasion mais, hier, ils étaient habillés pareil ! |
Il est réjouissant de voir sur scène un type qui rencontre le succès après avoir écumé pendant plus de vingt ans les scènes punk-rock de la capitale. Et s'il est là ce soir, sur la scène d'un Zénith, c'est qu'il a foi en la musique, qu'il aime ça, tout simplement. Aussi notre joyeux quadra a la fraîcheur d'un petit nouveau. Bonne humeur garantie, orchestration originale avec mandoline, contrebasse, accordéon, trompinette et washboard... Sans oublier un pad, des boucles, etc... car si la dominante est acoustique, Féloche ne s'interdit pas d'utiliser les outils technologiques contemporains. Si toutes ses chansons ne sont pas inoubliables, Féloche est bien sympathique. Visiblement, le public connaissait déjà ses titres "La Vie cajun" ou "Darwin avait raison", et l'applaudimètre est un bon indice du plaisir qu'il lui a donné. Avant de quitter la scène, il a juste le temps d'annoncer le prochain Festival de Mandolines qui se tient à Lunel, pas loin d'ici, à la fin du mois : "unique au Monde" !
Pause. A nouveau, propos bêtifiants d'animateurs débiles, nous annonçant, en gros, que maintenant les choses sérieuses allaient commencer, qu'on allait pouvoir danser. Pas de bière au bar.
Les Detroit Grand Pubahs combinent dans leur musique les deux grands genres majeurs qui font l'identité de leur ville. Leur techno-funk puise donc aux sources locales. Leur funk n'est pas celui de la Motown, trop polissé, mais celui de Clinton et sa bande, originaires de Détroit. Comme eux, ils développent leur obsession pour le booty dans la bonne humeur et le second degré.
Paris The Black Fu (aka the Schizophrenic Brainchild of Funkno !!! aka Dr. Bootygrabber !!!) est la figure centrale du groupe, barbe postiche et lubricité (en berne ce soir), secondé par le Mysterious Mr. O, effrayant derrière son masque de vieux chauve. Ce soir, le duo est accompagné par un saxophoniste, crâne rasée et moustaches (postiches ?) Fu-Manchu. Notre débonnaire Black Fu, avec son look de Rabbi Clinton, est généreux, il offre aux premiers rangs bouteilles de 'sky et cannettes de bière. S'en gardant toutefois quelques généreuses goulées. Mais je suis bien en peine de trouver le funk dans leur techno. Le public, disons-le, ne bouge guère, et pas seulement parce qu'on est serré dans la fosse. Les Detroit Grand Pubahs nous balance leur son sans concession, plante leur univers plus glaçant que booty-esque...
Après, je ne vais pas la jouer Cendrillon mais un certain impératif m'a fait rater les Scratch Bandits Crew... C'est la vie. C'était les Nuits Zébrées de Radio Nova, édition 2010.
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