dimanche 29 janvier 2012

Le Retour de D'Angelo


D'Angelo est en ce moment même sur la scène du Zénith. Ce retour méritait hommage. Annoncée depuis quelques mois, sa tournée européenne demandait confirmation le moment venu. Pensez, après une douzaine d'années d'absence, on pouvait sérieusement douter de son retour. Allait-il une fois de plus faire faux bond ?


Un come-back de D'Angelo ? De l'artiste le plus brillant et charismatique de sa génération ? Si brillant que personne n'a depuis pris sa place, personne ne sort du lot des chanteurs de soul, funk, R&B comme lui s'en détachait à l'époque. Son retour ? On avait presque cessé d'y croire. Il a d'ailleurs tout fait pour qu'on n'y croit plus. Lui, l'auteur de l'album le plus essentiel de ce début de millénaire, Voodoo, semblait avoir pris le gâchis pour compagne. Les rares morceaux inédits qu'il ait proposé pendant toute cette période ne dépassaient pas le stade de la démo ! Seul le titre de l'un d'eux, "I Found my Smile Again", laissait espérer que leur auteur aille mieux et qu'il ait, littéralement, retrouvé son sourire !

Cette longue traversée du désert l'aura vu aux prises avec les abus divers. Classique. De ces années-là a-t-il seulement tiré une "connaissance par les gouffres" ? Même pas.

?uestlove, un de ses amis proches qui était son batteur lors de la tournée de Voodoo, a révélé combien D'Angelo était quelqu'un de tenaillé par le doute. Un aveu qui semblait difficilement imaginable à quiconque a eu la chance de le voir lors de son légendaire concert du Grand Rex, en 2000. Je n'avais jamais envisagé une seconde que ce type puisse douter de lui, comme le soulignait ?uestlove ! Au contraire, l'homme qui était sur scène semblait tellement sûr de son propre charisme. Le type pouvait tout oser. En état de grâce, jouant avec le public et ses émotions. D'Angelo avait un charisme et une présence inouïs.

Pourtant, ?uestlove expliquait combien, certains soirs, c'était un calvaire pour lui de monter sur scène, combien il ne se sentait pas près physiquement à le faire. Que les retards étaient dûs à ses doutes ! D'Angelo se sentait prisonnier de son image, de ce fameux clip de "Untitled" qui l'avait consacré sex-symbol à la musculature parfaitement sculptée ! Aussi, disait ?uestlove, quand son ami ne se sentait pas assez affuté, retardait-il le concert pour se lancer dans des séries de pompes et d'abdos à n'en plus finir !

Au Grand Rex également, il était arrivé très en retard. Les sifflets et les cris montaient dans la salle. L'ambiance brûlait d'une incroyable tension. Puis, l'obscurité se fit et le son lourd suffit à calmer tout le monde. D'Angelo apparut et avait déjà tout le monde dans sa poche. Qui aurait pu imaginer qu'il flippait en coulisses et s'épuisait en exercices ! 

Alors, ce soir, je ne suis pas au Zénith... C'est dommage. En même temps, même si les premiers témoignages de son concert à Stockholm sont enthousiastes, je doute que cette tournée puisse rivaliser avec celle qui suivit la sortie de Voodoo. Peut-être vaut-il mieux garder le souvenir d'une soirée électrique, d'un groupe de musiciens fantastique qui jouait un funk torride au service d'un artiste au sommet de son art. Peut-être le concert le plus extraordinaire que j'aie jamais vu !

Ces dernières années, on avait compris que D'Angelo allait mal. S'il était familièrement appelé D' tout court par ses proches et ses fans, on rappelera qu'en français, D' tout court, ça se prononce "déprime" ! Les rares images circulant de lui montraient quelqu'un qui avait pris beaucoup de poids. Quand on sait l'importance qu'il attachait à son apparence, on imaginait qu'il devait se sentir au fond du trou, son narcissisme en vrac. Et, en même temps, on mesurait ses contradictions. Car, après tout, il était bien celui qui avait écrit un simili-manifeste pour le livret de Voodoo où il regrettait le manque de spiritualité de ses contemporains. Celui qui y affirmait : "I, personnally, believe in art as it exists in the context of the phrase 'thou art God'. In this phrase, art is the word that connects the individual (thou) to their higher self (God) or to that which is universal". Et Dieu, qu'est-ce qu'il en a bien à foutre que vous ayez des biceps affutés et des abdos en tablettes de chocolat, hein ? D'Angelo devenu bouffi n'avait pas besoin d'un préparateur physique ou d'un diététicien, plutôt d'un bon shrink !

Mais, forcément, quand les seules images d'un artiste que l'on voit pendant des années sont des photos volées où il n'est pas à son avantage, pour rester poli, on sent bien que l'apparence est un sujet épineux pour l'intéressé. Surtout quand les affiches pour ces nouvelles dates de 2012 sont illustrées par une photo d'avant ! Il y a bien malgré nous une curiosité malsaine qui vient nous titiller : à quoi resemble-t-il aujourd'hui ? Est-il toujours bouffi ?

Les premières images de D'Angelo sur scène en 2012 sont rassurantes. Le bonhomme est évidemment plus massif, plus lourd mais il se présente avec un t-shirt sans manches, biscottos à l'air ! N'aurait-il rien compris ?


Bon, n'allez pas croire que je pinaille, qu'importe le physique, bien sûr que je me réjouis qu'il soit en forme plutôt que négligé. Sur les vidéos du concert de Stockholm, il semble détendu, souriant, heureux d'être là et c'est l'essentiel. Le retour d'un si grand artiste est forcément un grand moment. Demain, je me précipiterai même pour chercher des compte-rendus et des vidéos de ce concert au Zénith. Et, surtout, vite la suite ! Je suis franchement impatient de découvrir son nouvel album, qu'il sonne comme un vieux disque de Funkadelic, guitares au vent, ou n'importe... Félicitations à Michael Eugene Archer, dit D'Angelo, pour ce retour. Nous lui souhaitons, après cette longue épreuve surmontée, une belle et longue carrière !




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